10/07/2019

INTERVIEW : Matthieu Teyssier d'Orfeuil, directeur général de l'hôtel Grand Powers

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Voici 100 ans que l’élégante bâtisse haussmannienne du Grand Powers (Small Luxury Hotels of the World), située à l’angle des rues François 1er et Pierre Charon dans le 8ème arrondissement de Paris, accueille le tout Paris mondain et les voyageurs du monde entier. Un siècle d’histoire pour un lieu de légende, en plein cœur du « triangle d’or », qui, grâce à la vision d’Alexandra Marang et du cabinet d’architecture Artefak, s’est métamorphosé il y a quelques mois en sublime boutique-hôtel au design alliant habilement contemporanéité et citations Art déco. Aux commandes de ces 50 chambres et suites désormais dotées d’un restaurant et d’un spa, Matthieu Teyssier d’Orfeuil, son directeur général, nous éclaire, entre autres, sur ce projet qui perpétue magistralement le rayonnement d’un « art de vivre à la française » mondialement réputé. Ecrin précieux, parfaite symbiose entre héritage culturel et créativité, le Grand Powers continue de s’inscrire comme l’un des chapitres incontournables du luxe à la française.   

Vendom.jobs - Pourriez-vous nous présenter vos diverses expériences, en tant que spécialiste F&B et directeur d’hôtel désormais ? Comment abordez-vous ces différentes fonctions ? Quel est, dans votre carrière, votre « fil rouge » ?

Matthieu Teyssier d’Orfeuil - Passionné par les belles tables, j’ai naturellement débuté ma carrière dans le milieu de la restauration pendant plusieurs années avant de prendre la direction d’un hôtel. Parmi mes précédents postes, j’ai été directeur des banquets et séminaires au Jardins de Bagatelle, puis directeur adjoint des restaurants du chef triplement étoilé Yannick Alléno dont j’ai ouvert les premiers bistrots parisiens.

J’ai ensuite rejoint les équipes du Park Hyatt Paris Vendôme, où j’ai occupé la fonction de directeur de la restauration en proche collaboration avec Jean François Rouquette, chef exécutif de l’hôtel.

Ces années gastronomie ont été ponctuées de rencontres incroyables avec des grands chefs, des passionnés qui ont su m’accorder leur confiance.

J’étais alors désireux de mettre mon énergie au sein d’un projet hôtelier global. J’ai eu la chance de rencontrer Alexandra Marang propriétaire du Grand Hôtel du Palais Royal, du Plaza Tour Eiffel, et du Grand Powers. J’ai immédiatement senti le partage de valeurs et de visions communes, tant sur l’aspect humain que sur l’avenir du luxe dans l’industrie hôtelière. C’est un privilège pour moi de travailler avec une entrepreneure française et si engagée.

La ligne directrice de ma carrière a toujours été « la confiance » : celle que je cherche à transmettre aujourd’hui en accompagnant et développant des équipes au quotidien. Je suis là pour donner confiance au personnel, qu’il s’agisse des membres du comité exécutif, ou des autres employés. Mon sentiment d’accomplissement se manifeste avant tout par la réussite et l’évolution d’un collaborateur.

V.J. - L'hôtel Grand Powers fait partie des « vitrines » historiques du raffinement parisien. Comment définiriez-vous le « savoir-faire à la française » dans les secteurs de l’hôtellerie de luxe et la gastronomie ?

M. T. d’O. - Lorsque nos clients entrent au Grand Powers, ils nous disent éprouver le sentiment de pénétrer dans la demeure d'un collectionneur. Situé au cœur du « triangle d'or » depuis 1920, au 52 rue François 1er, l'hôtel est dans un quartier convoité et occupe un immeuble d'angle d'architecture haussmannienne, c'est ici tout le chic à la française qui s'exprime.

Le « savoir-faire à la française », à mon sens, est un mode de vie qui évoque l’excellence, l’élégance, l’étiquette, la bienséance, la politesse, le savoir-être, le savoir-vivre, l’art de recevoir, l’amour du produit et la gastronomie.

Il se définit aussi par ses acteurs. Je suis entouré de jeunes managers passionnés venant pour la plupart de palaces parisiens où ils occupaient souvent une place de numéro deux. Ceux-ci ont pour mission de transmettre leur savoir faire et leur technicité. L’ensemble de nos collaborateurs a ensuite été recruté sur des critères humains, et nous avons des personnes venant de tout horizon culturel, tous avec des personnalités différentes mais qui partagent des valeurs communes, l’excellence, l’engagement et la sincérité.

Celadon Junior Suite

V.J. - Pensez-vous que ce « patrimoine » fasse encore sens de nos jours – vis-à-vis d’une clientèle de plus en plus internationale – et, si oui, dans quelles mesures ?

M. T. d’O. - Le « savoir-faire à la française » fera toujours sens vis-à-vis d’une clientèle internationale. Nos clients, particulièrement les plus jeunes, sont exigeants et la destination Paris, sur notre marché luxe, est gage de cette qualité de service. Nous devons défendre ces valeurs de service tout en cherchant à repenser notre offre.

Je pense que l’avenir du service n’est plus le cérémonial classique, aujourd’hui fatigué, des brigades militaires des hôtels d’autrefois. La France est le pays des libertés ; sans transiger sur l’excellence il est aujourd’hui important que les collaborateurs puissent délivrer un service reflet de leur personnalité. Nos clients veulent de la sincérité.

Elegant Suite

V.J. - D’ailleurs, la nouvelle mouture du Grand Powers a su fusionner, avec une grande élégance, son histoire et un hommage au design. Pourriez-vous nous en dire plus sur ce projet : sa naissance, son développement, son accueil par la clientèle à sa réouverture ?

M. T. d’O. - Alexandra Marang notre propriétaire, a fait confiance à Cathy Crinon et Arnaud Bezhadi qui ont su sublimer le Grand Powers. Le projet était de conserver l’héritage et le patrimoine parisien du bâtiment et des chambres en y apportant une touche contemporaine et intemporelle déclinant de belles influences du design du 20ème siècle. De nombreux éléments sont le reflet du passé (l’escalier en bois sculpté, les cheminées en marbre dans chaque chambre, les volumes et moulures de l’haussmannien…) et côtoient aujourd’hui un superbe mobilier sur mesure et des matières chaleureuses et enveloppantes.

Nous avons voulu faire de l’hôtel un lieu de vie du quartier. Il existe très peu de lieux accessibles au rendez-vous dans le « triangle d’or ». Le Café 52 est une adresse élégante, chic et décontractée. Notre chef Maxime Raab, qui fut le second au Fouquet’s, propose une cuisine légère et équilibrée. Nos clients autant que les habitués du quartier sont ravis d’avoir une nouvelle adresse accessible et sans prétention.

V.J. - Comment, selon vous, arrive-t-on encore à créer des lieux comme celui-ci qui possèdent leur propre personnalité mais en même temps savent toujours créer la surprise, tout en devançant l’air du temps ? Quels sont pour vous les ingrédients de cette « formule magique » ?

M. T. d’O. - Selon moi, la personnalité du lieu est un juste accomplissement entre la décoration et la dimension humaine. Ce sont les équipes qui font vivre le produit. Très peu d’hôtel réussissent à avoir une « âme ». Dans ce projet, nous avions à cœur de conserver et sublimer l’âme du Grand Powers, et celle-ci est parfaitement incarnée par les équipes.

Nous œuvrons pour que le Grand Powers soit l’hôtel de demain, nos équipes ont écrit un design de service unique sur le marché du luxe parisien, avec des signatures de service classiques mais aussi avant-gardistes qui forgent l’identité de l’expérience client.

Vous seriez surpris du degré de personnalisation que les équipes sont capables de délivrer lorsqu’on leur laisse la liberté d’entreprendre. Il n’y a rien de préétabli ici, chacun œuvre à ce que l’expérience client soit unique.

Café 52

V.J. -  Que recherche, selon vous, la clientèle de l'hôtel Grand Powers en matière d’expérience ?

M. T. d’O. - La clientèle recherche un art de vivre parisien, où le ton est adéquat, le produit élégant et le service est excellent mais aussi sincère, comme je l’ai déjà indiqué. Notre clientèle a le privilège de se sentir ici chez elle.

La promesse du Grand Powers est « L’humain au cœur de l’excellence ».

Nos clients ne cherchent pas un cérémonial de service, il cherche la prolongation naturelle de ce qu’ils ont chez eux : un service efficace mais simple, des produits de qualité, une technologie développée, un restaurant healthy et une offre bien-être. Nous avons imaginé le spa Thala comme un cocon protecteur et énergisant. Doté d’un grand jacuzzi, d’un hammam et d’un sauna, le temps s’y suspend. En partenariat avec le club Tigre Yoga nous proposons, par exemple, à nos clients des « mornings yoga » avec petits déjeuners healthy dans nos suites.

V.J. - Quels sont, selon vous, les prochains challenges sur le marché de l’hôtellerie de luxe ?

M. T. d’O. - Il faut aborder le sujet de la digitalisation et de la technologie dans l’univers du luxe. Nous allons devoir trouver le juste dosage entre technologie et relation client.

Nous sommes tout près d’avoir nos clés de chambre et payer nos chambres d’hôtels sur nos téléphones, nous ne passerons peut-être bientôt plus par la réception. Cela va considérablement impacter et certainement faire évoluer positivement les méthodes de travail de nos collègues. J’espère que ces méthodes laisseront toujours plus de place pour mieux s’occuper des clients, développer la relation de service dans des moments différents.

V.J. - Quel est votre luxe personnel ?

M. T. d’O. - Me retrouver à la campagne dans mon élément, le calme et la nature, allumer un grand feu de cheminée, faire cuire des Saint-Jacques ou une côte de bœuf sur la braise, ouvrir une bouteille de Saint-Joseph « Cuvée du Papy » de chez Montez et partager ce moment en famille ou entre amis.

Hôtel Grand Powers

52 Rue François 1er

75008 Paris – France

0033 (0)1 47 23 91 05

https://www.hotelgrandpowersparis.com/fr/

 

(Crédit photo : Grand Powers)

 

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